Circulaire DGAS/2A no 2006-241 du
1er juin 2006
relative aux dérives
sectaires
NOR : SANA0630280C
Référence : décret no 2002-1392 du
28 novembre 2002.
Texte modifié : circulaire DGAS
no 2000-501 du 3 octobre 2000 sur les dérives
sectaires.
Annexe : les fonctions des correspondants en charge
des dérives sectaires.
Résumé : La présente circulaire relative
aux dérives sectaires rappelle, d’une part, les règles qui s’imposent aux agents
publics au sein du service et, d’autre part, les règles qui encadrent l’action
de l’administration dans l’exécution de ses missions auprès du public. Sur ce
second point, elle reprend et clarifie le contenu de la circulaire DGAS
no 2000-501 du 3 octobre 2000 relative aux dérives
sectaires. Elle précise l’action de l’ensemble des agents de l’administration
sur ce champ. Elle définit par ailleurs les fonctions exercées par les
correspondants des directions régionales et des directions de l’administration
centrale en charge des dérives sectaires.
Le ministre de l’emploi, de
la cohésion sociale et du logement, le ministre de la santé et des solidarités à
Monsieur le secrétaire général des ministères chargés des affaires
sociales ; Madame le chef de l’inspection générale des affaires
sociales ; Mesdames et Messieurs les délégués généraux, délégués,
directeurs généraux, directeurs et chefs de service de l’administration
centrale ; Mesdames et Messieurs les préfets de région (directeurs
régionaux du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle, directeurs
régionaux des affaires sanitaires et sociales, déléguées régionales aux droits
des femmes) ; Mesdames et Messieurs les préfets de départements (directeurs
départementaux du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle,
directeurs départementaux des affaires sanitaires et sociales, les chargés de
mission départementaux aux droits des femmes).
I. - COMPORTEMENT DES AGENTS PUBLICS
AU
SEIN DES SERVICES
Les agents du service public bénéficient,
comme tous les citoyens, d’une totale liberté de conscience qui interdit toute
discrimination dans l’accès aux fonctions comme dans le déroulement de la
carrière qui serait fondée sur la religion.
Cette
affirmation se fonde sur l’article 10 de la Déclaration des droits de
l’homme et du citoyen selon lequel « Nul ne doit être inquiété pour ses
opinions même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre
public établi par la loi. » et sur le préambule de la Constitution de
1946 : « Nul ne peut être lésé dans son travail ou dans son emploi, en
raison de ses origines, de ses opinions ou de ses
croyances. »
Toutefois, ils ne doivent à aucun
moment de leur activité professionnelle faire état d’un éventuel engagement et
leur comportement, tant dans le service qu’à l’extérieur de celui-ci, doit
respecter le principe de neutralité.
Les principes de
laïcité et de neutralité du service public font obstacle à ce que les agents
publics disposent dans le cadre du service du droit de manifester leurs
croyances.
La manifestation - sous quelque forme
que ce soit - d’une croyance pendant l’exercice des fonctions constitue une
faute disciplinaire qui peut faire l’objet d’une
sanction.
Par ailleurs, les agents publics sont tenus
à une obligation de réserve qui prolonge les obligations du service dans le but
de protéger la neutralité du service public.
Ainsi,
ils ne peuvent pas démarcher leurs collègues ou les usagers du service public,
même en dehors des heures de service, en alléguant de leur appartenance au
service public, pour les faire participer à des activités privées de type
religieux, confessionnel.
Ils ne peuvent pas utiliser
les moyens du service pour une activité strictement privée et en particulier une
activité associative ou cultuelle. Ils ne peuvent pas faire apparaître leur
qualité d’agent public et leurs coordonnées professionnelles sur des documents
ou des sites de ces associations. De tels comportements sont passibles de
sanctions disciplinaires. Il en est de même pour les transmissions
d’informations à des tiers ou les soustractions de
documents.
(Cf. : avis 4/6 ssr
3 mai 2000, Mlle Marteaux, no 217017, publié au
recueil. 15 octobre 2003, M. Odent, no 244428,
publié au recueil).
II. - L’ACTION DE
L’ADMINISTRATION
1. Règles qui encadrent l’action de
l’administration
dans ses relations avec les usagers
L’Etat doit à nos concitoyens la
garantie de la sûreté considérée par l’article 2 de la Déclaration des
droits de l’homme et du citoyen comme un droit naturel et imprescriptible de
l’homme. Ce rôle de la puissance publique est l’un des plus anciens et l’un de
ceux qu’elle ne peut pas déléguer. L’Etat ne peut donc pas rester indifférent
aux dérives sectaires et il est de son devoir d’intervenir pour les prévenir.
L’intervention de nos services, qui ont en charge les personnes les plus
vulnérables, est - à cet égard -
essentielle.
L’engagement de l’Etat et des
collectivités territoriales concernées dans la lutte contre les dérives
sectaires a été réaffirmé par le décret du 28 novembre 2002 instituant
la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives
sectaires, placée auprès du Premier ministre. Celle-ci est notamment
chargée : « De favoriser, dans le respect des libertés publiques, la
coordination de l’action préventive et répressive des pouvoirs publics à
l’encontre de ces agissements. » Ces dispositions affirment donc très
clairement le double rôle de prévention et de répression que le Gouvernement
entend assumer.
Cette action doit être réalisée de
manière coordonnée en liaison avec les services de police administrative, les
services de police judiciaire et le ministère public ainsi qu’avec les
magistrats spécialisés, chargés des personnes vulnérables : juges des
enfants, juges des tutelles etc.
2. Une action fondée sur le respect des règles de droit commun
Les dérives sectaires peuvent être à l’origine de violation(s) de la législation sociale. C’est donc à partir d’un constat classique, relevant du droit commun, que les services de l’Etat vont se déterminer. La « secte » n’est qu’un cadre particulier où se présentent un ou des faits dont le traitement est et reste de la responsabilité des services dans leurs champs de compétence habituels. En ce sens, les services peuvent être conduits à exercer :
2.1. Une action préventive
Une action préventive doit en
particulier reposer sur une vigilance dans les procédures d’autorisation et
d’agrément ou d’octroi de subventions qui pourraient bénéficier à des personnes
physiques ou morales dont le mode d’action s’avérerait contraire aux textes et
règlements en vigueur. Il vous appartient ainsi de veiller aux statuts du ou des
demandeurs, aux activités conduites et aux conditions
d’organisation.
Les champs de la santé, du
médico-social (personnes handicapées, personnes âgées), de l’emploi et de la
formation professionnelle feront l’objet d’une vigilance
renforcée.
Une veille toute particulière sera
organisée dans le champ des structures et dispositifs destinés spécifiquement
aux mineurs.
2.2. Une action de contrôle
Il s’agit d’exercer un contrôle, dans
les conditions de droit commun, face à certains modes de fonctionnement qui
transgressent le droit et apparaissent préjudiciables à l’ordre public. Les
différents corps d’inspection de nos ministères assurent à ce titre une fonction
primordiale.
La plupart des dossiers liés aux dérives
sectaires présentent des aspects relevant de différentes législations. Compte
tenu de la transversalité des problèmes rencontrés, les inspections seront de ce
fait souvent coordonnées, voire conjointes. En ce sens, le traitement de ces
dossiers nécessite, d’une part, un rapprochement entre les différents corps
d’inspection de nos ministères, d’autre part, un rapprochement avec les corps
d’inspection des autres ministères (services fiscaux, concurrence, consommation
et répression des fraudes, etc), les services de police, de gendarmerie et le
ministère public.
2.3. Une action de prise en charge des victimes des sectes
Les dispositifs de droit commun seront utilisés au profit des adeptes et de leurs familles, en particulier lors de leur sortie de l’emprise de ces groupes. Les dispositifs relevant d’une logique de réinsertion, en particulier ceux liés aux questions de logement, ressources et accompagnement social, devront être mobilisés par les services déconcentrés, en liaison avec les autre partenaires, en particulier la justice et l’ensemble des services sociaux locaux. Il en sera de même en matière de soutien psychologique.
3. Un dispositif d’appui spécifique
Les difficultés liées au
traitement des dérives sectaires ont conduit à la mise en place d’un dispositif
d’appui spécifique dont l’objet est malgré celles-ci de continuer à appliquer le
droit commun.
Le dispositif concourt donc au travail
de l’ensemble des agents de nos ministères qui pourraient être amenés à traiter
un dossier lié à des dérives sectaires.
Un chargé de
mission, rattaché à la Direction générale de l’action sociale, assure pour le
ministère de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement et pour le
ministère de la santé et des solidarités, la responsabilité de l’animation et de
la coordination de l’ensemble des actions liées au traitement et à la prévention
des dérives sectaires. Il assure tout lien utile avec la mission
interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires
(MIVILUDES), les ministères de la justice et de
l’intérieur.
Se trouvent aussi désignés des
correspondants tant au niveau des directions déconcentrées que des directions de
l’administration centrale. Les fonctions exercées par ces correspondants sont
précisées en annexe de la présente
circulaire.
Un groupe de travail réunit chaque mois
l’ensemble des correspondants désignés sur ce domaine au sein de
l’administration centrale. Il permet d’évoquer les difficultés méthodologiques
qui seraient apparues et d’aider à les résoudre.
4. Un instrument de veille
Les situations liées à des
dérives sectaires, ou supposées telles, rencontrées par des agents du ministère
de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement et du ministère de la santé
et des solidarités feront l’objet d’une information des correspondants régionaux
ou de l’administration centrale chargés des dérives sectaires. Ces situations
seront parallèlement signalées par : c.c.mail (DGAS-AVIE-
SECTES@sante.gouv.fr), au chargé de mission qui assure la responsabilité de
l’animation et de la coordination de l’ensemble des actions liées au traitement
et à la prévention des dérives sectaires.
Le directeur du cabinet, J.-F. Carenco |
Le directeur de
cabinet, B. Bonhert |
ANNEXE
LES FONCTIONS DES CORRESPONDANTS
EN
CHARGE DES DÉRIVES SECTAIRES
Les correspondants assurent des fonctions
de sensibilisation et de formation de leurs propres directions ainsi que des
organisations professionnelles et réseaux associatifs avec lesquels ces
directions sont en lien. Ils assurent par ailleurs des fonctions de veille, de
recueil et de partage des informations liées aux dérives sectaires. Ils
apportent enfin leur concours aux services dans le traitement des dossiers liés
à ces dérives.
Les correspondants des directions
régionales :
En cohérence avec le réseau des
correspondants de la MIVILUDES, les correspondants de nos ministères sont
désignés au niveau des directions régionales (DRASS, DRTEFP). Les correspondants
ainsi désignés sont invités à se constituer en « binôme ». Au delà de
l’information et de la sensibilisation de leurs propres directions, ils sont
invités à proposer aux comités techniques régionaux et interdépartementaux
(CTRI) de définir les organisations les plus pertinentes pour développer ces
mêmes actions.
Les liens de travail avec les
administrations et collectivités territoriales concernées (conseil général,
municipalité...), la participation aux réunions organisées par les préfets de
département et les parquets généraux permettent de recueillir et de partager
toutes les informations utiles au champ de compétence de nos administrations. Il
en est de même pour les liens de travail qui peuvent se développer avec les
antennes locales des associations intervenant dans le champ des dérives
« sectaires ». Les informations ainsi recueillies font l’objet d’un
examen par nos direction régionales ou départementales. Il appartient alors aux
services de prendre les mesures adéquates et mener toute action administrative
nécessaire.
En cas de difficulté persistante dans le
traitement d’un dossier lié aux dérives « sectaires », les
correspondants en avisent le chargé de mission responsable de la coordination
des actions liées au traitement et à la prévention des dérives sectaires.
Certains de ces dossiers peuvent alors faire l’objet d’un examen du groupe de
travail permanent sur les dérives sectaires. Enfin le chargé de mission est
destinataire début février de chaque année d’un bilan régional établi par chaque
« binôme », bilan portant sur l’évolution des dérives sectaires dans
le champ de compétence de nos administrations et sur les actions administratives
conduites en ces domaines.
Les correspondants de
l’administration centrale :
Les correspondants
des directions de l’administration centrale ont pour mission de sensibiliser
celles-ci à la problématique des dérives sectaires. Ils veillent également à
assurer la sensibilisation des organisations professionnelles et des réseaux
associatifs avec lesquels ces directions sont en lien. Ils apportent un soutien
technique et méthodologique aux bureaux de leurs directions qui peuvent avoir à
traiter un dossier lié aux dérives sectaires ainsi qu’aux services déconcentrés
qui en font la demande. Le chargé de mission responsable de la coordination du
traitement des dérives sectaires leur transmet sur leurs champs de compétence
toute information émanant des correspondants régionaux. Ils assistent aux
réunions du groupe de travail prévu par la circulaire du
3 octobre 2000. Ils informent le chargé de mission de toute difficulté
rencontrée dans l’application de la présente circulaire. Ils établissent début
février de chaque année le bilan pour leurs directions, bilan portant sur
l’évolution des dérives sectaires et sur les actions administratives conduites
en ces domaines.